L’enjeu est énorme.

En effet, le triomphateur gagne un week-end en thalassothérapie (basse saison) à Quiberon, plusse une console de jeu avec le dernier Super Mario pour ses enfants, plusse une machine à faire des frites en forme de Mickeys pour sa femme.

Énorme !

Le perdant, lui, s’est engagé à traverser Paris de Denfer Rochereau à la Bastille, à pied, sous les huées du public et en direct sous l’œil goguenard des caméras.

Énorme !

Double motivation en quelque sorte.

Revenons à la scène.

Un homme grossièrement harnaché en soldat romain, avec une plume en plastique rouge plantée à la “va-comme-je-te-pousse” sur le sommet d’un casque de carnaval, les reins ceint d’un paillasson, est en grande conversation avec son coach :

- Tu te rends compte ? Maxence vient de me dire : “ OK, Hervé, moi aussi je veux atteindre le top. Mais est-on obligé de faire ça dans une ambiance aussi délétère?”.

Le coach : Il a voulu t’atteindre psychologiquement, c’est tout. Il sait bien qu’en tant que secutor il a un incontestable avantage sur toi. Il a même obtenu aux éliminatoires une masse d’arme médiévale à la place du glaive normal.

Hervé : C’est une ordure. Me dire ça juste avant de rentrer dans l’arène : c’est un coup bas !

Le coach : Reste positif Hervé. Déjà que tu n’as pas de pectoral et que tu n’as pas obtenu ton filet de rétiaire à cause du vote du public ! Garde le moral au beau fixe si tu veux avoir une toute petite chance.

Hervé : Bien entendu, il a dit cela “off”. Aucune caméra n’était braquée sur nous.

Le coach : Reste calme, je te dis. Ne te laisse pas atteindre. Pense plutôt à ce que tu peux faire pour tenter de retourner le mauvais sort qui s’acharne contre toi. Je te le répète : essaye de lui planter ton trident dans les orteils. C’est le seul endroit qui n’est pas protégé.

Hervé : Tu as raison, je dois rester agressif ! Mais tout de même, il m’a dit : “délétère”. Tu te rends compte ! Il n’aurait pas osé faire ça devant les caméras.

Le coach : Mais tu venais de lui lancer : “je vais te crever comme une vulgaire côte de bœuf sur un barbecue”. C’est bien ça que tu lui as dit non ?

Hervé : Oui, mais c’était pour rigoler…

À ce moment “Coco”, l’assistant assermenté de la télé passe dans le couloir avec sa queue-de-cheval grisonnante et lance à Hervé d’une voix de fausset :

- Aller, mes Chéribibi (il appelle tout le monde comme ça) ; ça va être l’heure de vérité. Il faut rejoindre Maxence derrière le rideau. On est à l’antenne en direct dans moins de trente secondes. Et que le meilleur gagne. Je te ferai signaler que tu as la plume de ton casque toute de travers (sic).

Quelques minutes plus tard, résultat du jeu : Maxence a un pied dans le plâtre, mais Hervé est mort. C’est son épouse Martine qui devra traverser Paris à sa place : dura lex, sed lex.

Maximilien, neuf ans, le fils d’Hervé, veut déjà relever le flambeau.

Énorme !

Contrainte : placer la phrase « OK, Hervé, moi aussi je veux atteindre le top. Mais est-on obligé de faire ça dans une ambiance aussi délétère?” et s’inspirer d’un horrible dessin de presse représentant deux gladiateurs ridicules face à face.