On avait des matins clairs et un soleil de bonne humeur
Il y avait encore des autos de flambeurs
Les trains de vie étaient fastueux les trains de luxe avaient des cabines couchettes
accolé d’un beau cabinet de toilette en acajou poli comme un larbin
les Princes étaient heureux et les escrocs charmants, les rats d’hôtel faisaient les cuivres
Les aéroplanes brillaient dans le ciel bleu ignorants déserts et forêts vierges
Et les foules émerveillées levaient les yeux

On aimait rêver la nuit
On aimait les romantiques
les coutumes exotiques
Les filles étaient jolies

Quand on y pense

Les poètes portaient des costumes cravates
Les artistes étaient sales, grands, et parfois riches
Les requins marteaux, les filles de joie, les enfants battus et les bagarres à la savate
Les chanteurs qui tenaient l’affiche avaient des guitares qui venaient d’Espagne
Quand les arabes étaient fiers, les nègres forts et les femmes fatales

Quand on s’aimaient les uns les autres
Quand c’était mieux avant
Quand on savait ce qu’on pensait, quand on avait envie
Quand on y pense
N’y pensons plus, n’y pensons plus…
Quand on y pense dis donc c’est loin tout ça, c’est loin !

Quand les hommes riches étaient bêtes et leurs femmes infidèles
Quand l’amour était vrai comme une pièce montée
le vin rouge, les fruits mûrs, les goûts forts, l’eau claire
Quand Paris était une fête avec des américains partout
Quand je pense que c’était nous qui les faisions rêver

On connaissait ses amis, on reconnaissait ses frères
Les châteaux chantaient, les belles dans les bois dormaient
On croyait aux bandits d’honneur, aux filles de joie si mal nommées,
y’avait des anglais, des rastaquouères, des légionnaires, des débonnaires
et des bonnes à tout faire, des hommes de main et les gendarmes avaient des capes et des sifflets
les secrets, les parfums étaient discrets
Et Fernandel chantait « je n’ai jamais connu l’amour“

Quand on y pense…