“Elles coraillent“ me reprend l'Académicien trônant sur un nuage
A moi —qui suis une nana anar militante— il ose me me faire ça ! Je vais lui faire péter une bombe.
Je sais : je dois les faire rôtir ce soir pour le gueuleton ces deux nénettes emplumées qui ne se doutent de rien.
Sur la place en bas, une foule m'acclame en me voyant apparaître à travers les rideaux. Je suis à poil ou quoi ? Oui, j'ai de beaux seins. Je suis élue. Et ces gens ont faim. Ils ont voté pour moi. Alors, je dois préparer le repas pour tout le monde.
Et ces deux pauvres pintades qui blablatent.

“Elles coraillent“ s'entête l'autre bicorné. Il m'agace. Les hommes m'agacent en général. Surtout ce grand-père avec son uniforme et son épée. Je l’apostrophe : “Tais-toi ou c'est toi que je décapite“.
L'inquiétude me saisi : que vais-je faire à manger ce soir ? Deux pauvres pintades pour tous ces gens, c'est peu. Et moi qui n'ai jamais tué personne. Et les plumes, qu'est-ce que je vais en faire ? Je donnerai les abats aux chats. Je dois tout de suite me mettre à éplucher des patates.

La plus âgée des deux volailles me demande “Vous avez besoin d'un coup de main ?“ Elle ressemble à ma copine Renée.
On frappe à la porte. La jolie vendeuse algérienne de chez le dépanneur en face livre des corn-flakes : cadeau de l'Ambassadeur. Quelle responsabilité ! Je vais devoir l'inviter. Mais c'est la jolie vendeuse que je voudrais croquer .
Je suis trempée de rage. Je vais déserter. Je ne suis pas d'accord pour de telles responsabilités.

Je me réveille en nage : je suis sauvée : ce soir c'est pâtes au beurre.
Je peux me rendormir sur mes deux oreilles.

J'ai le sommeil agité dans ce HLM. La dame antillaise à côté crie très fort sur son mari. Et puis il y a le vide ordure qui sent. Enfin, ce soir, pâtes au beurre, ça ira.