Je n’ai aucune idée de ce qu’aime ce type que je ne connais pas.

Mon intuition me dit que c’est un homme fourbe, déloyal.

Sans rien savoir de lui, je le déteste.

Je me renseigne auprès de Cathie pour savoir ce qui lui plait.

Je ne voudrais pas lui offrir quelque chose qui lui ferait plaisir. Ce serait le comble.

Je ne me rends à cette soirée que pour plaire à Cathie dont je suis amoureux et que j’espère bien voir quitter cet Armand le plus vite possible pour venir habiter avec moi.

Elle me dit qu’il aime les voitures. Je les déteste, personnellement. Je pourrais lui offrir une boule déodorante à pendre à son rétroviseur, car il fume.

Un truc qui sent la Harpic. Et puis non. C’est encore trop bon pour lui.

Alors, des gants de cuir noir qui déteignent sur les mains. Mais comment être certain qu’ils vont déteindre ? Il est bien difficile de demander dans une peausserie « avez-vous des gants qui déteignent ? »

On va toujours me dire que non, qu’ils sont parfaits, capables de résister aux suées les plus aigres et acides.

Je renonce. Il me faut une autre idée, plus perverse.

Je pense à un chien. Un gros chien qui pue et qui bave et va ruiner les banquettes de sa voiture. Mais cela coûte trop cher. De plus, j’aime trop les bêtes pour en forcer une à vivre avec cet Armand.


C’est le grand soir. Je sonne à la porte du pavillon. J’ai mon petit paquet à la main. J’ai sué sang et eau pour enfin trouver l’idée géniale. Il y a au moins cinquante personnes invitées. On mange dans des positions inconfortables. Cathie s’occupe peu de moi. Je m’ennuie. Heureusement, je trouve un groupe de cruciverbistes et je peux participer à leur conversation.

Vient le moment du gâteau. Armand souffle les bougies. On braille « happy birthday to you… ». Il monte sur une chaise et Cathie lui passe un à un les paquets. Il déballe. On voit apparaître des livres de voyage, des bougies parfumées, des gants de voiture, une boule à parfum, et même un petit chien qui aboie comme un fou et lui mord le doigt dès la première seconde.

C’est interminable.

J’attends avec impatience que ce soit le tour de mon petit paquet car Armand dit un mot à chaque fois, prend des airs ravis, se tortille en faisant semblant d’avoir tellement plaisir. Je suis curieux de savoir comment il va réagir en voyant ce que j’ai eu le toupet de lui offrir.

Mais ça ne vient pas. Mon truc doit être le dernier ; ce n’est pas possible.

Non, pas tout à fait : le voici.

Armand s’énerve. J’ai mis une quantité formidable de scotch pour rendre l’ouverture plus pénible. Ça marche.

Finalement, la boîte de chocolat apparaît et Armand dit : « merci, j’adore le chocolat ».

Il a l’air réellement content. Je me demande si je ne me suis pas trompé. Je croyais que les diabétiques n’aimaient pas le chocolat. Mais, au fond, je n’y connais pas grand-chose en diabétiques. Le pire c’est qu’il offre un chocolat à Cathie et l’embrasse sur la bouche.

C’est vraiment dégoûtant.