Comme une vieille truie pourrie de complexes et de frustrations après une vie passée à s’engraisser au lieu de profiter des délices de la vie… c’est comme ça que le grammairien Claude Favre de Vaugelas se découvrait avant de monter sur sa chaise pour se pendre. On était le 18 août 1626. Armand Jean du Plessis de Richelieu venait de lui supprimer sa pension et Louis XIII n’avait pas levé son royal petit doigt pour défendre son «greffier de l’usage».

Il venait de lire une étude publiée en Sorbone sur l’invention du dictionnaire. Gilles Ménage, ce misérable lexicographe fossoyeur de mots y était présenté comme un novateur ! Claude, le nostalgique arpenteur du langage classique (le connil avait depuis longtemps fait place au lapin) sentait bien que la bataille était perdue . L’effort de toute sa vie était voué à n’être plus défendu que par quelques vieilles femmes littéromanes.

Il voulait mourir. Mourir de honte serait son lot.

Il avait laissé sur son pupitre d’étude le mot définitif que tout pendu se doit d’écrire à la postérité : “Je m'en vais, ou je m'en vas, car l'un et l'autre se dit, ou se disent”. Phrase ridicule et sans humour d’un digne linguiste dingue qui résume à elle seule le paradoxe infini des contempteurs de la langue qui évolue. C’est pourtant cette phrase (qui passe pour être sa dernière alors qu’il s’est loupé, la corde ayant cassé) qui le fera « un peu » rester dans l’histoire. Car qui se souvient de lui ; sinon quelques plaques de rues ?